Rédaction : CDAD du Jura.
La conclusion du mariage est souvent précédée par des préliminaires qui ne doivent toutefois aucunement porter atteinte à la liberté du mariage. Mais ils sont utiles, permettant de se connaître, de s'éprouver.
En effet, la liberté matrimoniale suppose que les futurs époux puissent changer d’avis jusqu’à la célébration. Pour cette raison, la jurisprudence considère que les fiançailles, qui s’analysent comme une promesse réciproque de mariage, n’ont aucune valeur obligatoire.
Pour autant, il est certaines hypothèses dans lesquelles le droit leur attache certains effets.
L’absence de valeur juridique des fiançailles
De manière classique, les fiançailles correspondent à une promesse réciproque entre un homme et une femme de se prendre ultérieurement comme époux.
Pendant longtemps s’est posée la question de leur nature juridique : s’agit-il d’un contrat ou d’un simple fait juridique ?
Si les fiançailles constituent un contrat, elles doivent en toute logique lier les promettants. En revanche, si elles ne constituent qu’un simple fait juridique, leur rupture doit rester libre.
C’est cette seconde analyse qui a été retenue par la Cour de cassation, consacrant par la même occasion le principe de la liberté matrimoniale .
Pour autant, les fiançailles sont une promesse : elles n’engagent pas, tout en constituant un engagement !
Josserand fit même une analogie entre les fiançailles et le contrat de travail à durée indéterminée : comme les fiançailles, ce contrat peut être unilatéralement rompu et l’auteur d’une rupture abusive engage sa responsabilité.
Il découle de cette solution que :
- Les fiançailles ne créent aucune obligation de se marier, chacun des promettants pouvant les rompre librement.
- Simple fait juridique, les fiançailles se forment sans condition. Nul besoin de faire une déclaration, d’avertir les tiers ou encore d’informer l’administration.
- Du fait de leur nature juridique, les fiançailles peuvent se prouver par tous moyens.
Quels sont les effets juridiques attachés aux fiançailles ?
En cas de rupture des fiançailles
Les dommages et intérêts
La rupture des fiançailles relève du pouvoir discrétionnaire de chaque fiancé et peut à ce titre intervenir à tout moment. Cependant, le droit de rompre ne doit pas être utilisé abusivement. En effet, une telle rupture pourra être sanctionnée sur le fondement de la responsabilité civile délictuelle ouvrant droit à des dommages et intérêts.
Pour pouvoir prétendre à des dommages et intérêts encore faut-il que le fiancé délaissé rapporte la preuve de 3 éléments.
- La preuve des fiançailles : en ce domaine prévaut le principe de la liberté de la preuve
- Le préjudice subi : ce préjudice peut être moral (souffrance éprouvée par la perte de son amour et par le fait d’être délaissé ou encore l’atteinte à sa réputation ) et/ou matériel (dépenses exposées en vue du mariage).
- e caractère fautif de la rupture : l’exigence du caractère fautif de la rupture tient au caractère délictuel de l’action. Si par le passé la charge de la preuve incombait à la fiancée délaissée; aujourd’hui, elle pèse fréquemment sur l’auteur de la rupture.
Le sort des cadeaux de fiançailles
Les cadeaux de fiançailles doivent-ils être restitués en cas de rupture ?
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Principe |
Exception |
Cadeaux de fiançailles |
Restitution lorsque le présent représente une valeur importante par rapport à la fortune du donateur et a été fait en vue du mariage (art. 1088 C.civ.)
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Conservation des présents d’usage. Par présent d’usage, on entend les cadeaux faits à l’occasion d’évènements importants de la vie, mais de faible valeur eu égard à la fortune du donateur |
Bague de fiançailles |
Conservation car assimilation de la bague de fiançailles à un présent d’usage.
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Exceptions |
Restitution lorsque la bague est de valeur importante par rapport à la fortune de celui qui l’a offerte. |
Restitution lorsque la bague constitue un bijou de famille (celle-ci étant censée être remise à la fiancée à titre de prêt à usage) |
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Exception |
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Conservation lorsque le fiancé à commis une faute en rompant.
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En cas de décès de l’un des fiancés
Lorsque le fiancé a trouvé la mort dans un accident provoqué par un tiers, l’autre pourra, malgré l’absence de tout lien juridique entre eux, obtenir réparation du préjudice moral et matériel que ce décès lui occasionne.[1]
Le « fiancé survivant » pourra ainsi prétendre au remboursement des dépenses engagées en vue du mariage…
L’admission du mariage posthume
Le droit admet également la possibilité pour un fiancé de se marier avec le défunt. En effet, le mariage posthume est autorisé par l’article 171 du Code civil[2]dès lors que sont réunies trois conditions.
- L’intention matrimoniale doit être rapportée. Or la jurisprudence unanime considère que l’existence préalable de fiançailles fait présumer cette intention.
- L’existence de « motifs graves ». Il s’agit le plus souvent de la grossesse de la fiancée ou encore de l’existence d’enfants que l’on souhaite légitimer.
- Une dispense du Président de la République
Le mariage posthume ne produit cependant que des effets extra patrimoniaux tel que l’usage du nom du mari prédécédé.
En revanche « ce mariage n’entraîne aucun droit de succession ab intestat au profit de l’époux survivant et aucun régime matrimonial n’est réputé avoir existé entre les époux ».
[1]Cass. Ch. mixte, 27 février 1970
[2]Loi du 31 décembre 1959.